Je ne sais pas si pour vous c’est pareil, mais franchement, y a des jours, où je sais vraiment, d’emblée, qu’ils vont être pourris de bout en bout. Et ce n’est pas qu’une vue de l’esprit, ou une interprétation déformante de la réalité pour la plier à cette idée que la journée va être une vraie journée de merde.
Et ça n’a rien à voir avec des histoires de pieds posés par terre, dès le réveil.
Moi, je sais précisément quand mes journées vont être vraiment pourries: pas celles où je me lève de mauvaise humeur. Je ne me lève jamais de mauvaise humeur; je n’ai jamais aucun à priori sur mes journées. Non, mes journées pourries, ce sont celles, très précises où les machines s’en prennent à moi avant 8 heures du matin. Exactement comme jeudi. Pourtant, la journée n’avait pas mal commencé. Réveil facile, bulletin météo de 6h30 très optimiste, trains à l’heure, gens pas chiants dans le train et contrôleur éminemment sympathique. Élèves qui répondent à mon bonjour aux abords du collège. De quoi commencer sa journée sous les meilleurs auspices.
Et là, j’entre dans la salle des professeurs. Une collègue seulement, en train de faire ses photocopies. Cool, je me dis, pas longtemps à attendre pour faire les miennes. Dis "bonjour". Répond pas. Pas grave. C’est la grande mode en ce moment. Vais pas m’agacer pour ça, la journée promet d’être belle.
Par contre, elle utilise la photocopieuse comme support pour découper ses documents et faire ses montages. Là, déjà, ça le fait un peu moins.
Poliment, mais un peu sèchement tout de même: "Excuse-moi, X (on va l’appeler X, c’est mieux pour tout le monde), mais pendant que tu fais tes montages, je ferais bien ma série de photocopies, si ça t’ennuie pas." "Non, pas du tout" (encore heureux, que je me dis tout de même en moi-même) "T’inquiète pas, ce sera rapide, que je lui dis: juste un recto-verso pour une classe."
Fais mon code, insère les originaux pour mon recto-verso. Programme le nombre de copies. Et c’est là, juste au moment d’appuyer sur le bouton que je sens que la machine a décidé de tout faire pour semer la zizanie entre ma collègue et moi. Pas le temps d’arrêter mon doigt. Trop tard, il a déjà appuyé sur le bouton… Trois exemplaires… TROIS exemplaires avant le fatidique bourrage papier en cascade sur tout le circuit de passage du papier. Sal…e de photocopieuse.
Je débourre, réinitialise. TROIS exemplaires …. et re-multi-bourrage. Re-débourrage. Là, je reconnais, j’ai attrapé la photocopieuse par les coins et je l’ai menacée. Y a pas d’autre solution, avec les photocopieuses récalcitrantes. Surtout quand on veut que ça aille vite: c’est qu’après les photocopies, faut faire les trous (oui, maintenant, on fait les trous dans les feuilles pour que les élèves les mettent directement dans le classeur; politique d’établissement d’allègement du cartable (1)). Et surtout, j’ai un café à prendre, avant de me retrouver face aux élèves. Car pour moi, « Sans café, journée ratée ».
Bon, la menace fonctionne, ma série de photocopies se termine sans incident. Les trous: pas de souci (y a un petit malin qu’a décalé les trous, mais avec mon œil de lynx, je le vois immédiatement, rectifie le placement des trous et évite des perforations excentriques).
Apparemment, toutes les machines de l’établissement s’étaient liguées contre moi: non seulement la machine à café ne me donne pas de café, mais elle me bouffe ma pièce tout de même et refuse de me la rendre.
Sonnerie. … Et ben, les gamins ont été AFFREUX, toute la journée. Exécrables, insupportables, bavards, agités, …
Mais j’ai eu ma revanche: le soir : besoin d’imprimer. Bon, c’est de bonne guerre, l’imprimante aussi me fait le coup du bourrage papier. A 15 minutes du départ de mon train. Je vois où elle veut en venir, celle-là… Débourre, et là, au moment de relancer l’impression, je lui coince le bouton. Na! Bien fait! Faudra que j’explique ça à mon administrateur réseau mais tant pis. Ça lui a fait les pieds!
(1) Si vous voyez pas le rapport, je vous expliquerai la logique, mais une autre fois.